Chasse et pêche au féminin

Kate Nadeau, fondatrice de la page Facebook Filles de Bois. (Photo : Courtoisie)
Kate Nadeau, fondatrice de la page Facebook Filles de Bois. (Photo : Courtoisie)

Lors d’un récent événement traitant de chasse et pêche, nous avons appris que les femmes représentaient dorénavant 30,6 % des personnes inscrites en 2024 dans le cours canadien de sécurité dans les armes à feu. En ce qui a trait à la formation d’initiation à la chasse, elles représentaient pour cette même année 28,4 % des nouvelles inscriptions en termes de nouvelles initiées dans le domaine. De dire dorénavant que la chasse et la pêche représentent des activités typiquement masculines est tout sauf vrai!   

Pour avoir l’opportunité d’initier et d’enseigner à des centaines de femmes, j’ai observé qu’elles assimilent rapidement les aspects techniques et qu’elles désirent transmettre rapidement leurs savoirs et leurs passions à d’autres femmes.   

De plus en plus de groupes de femmes 

À preuve à l’été 1999, le programme Fauniquement femme voyait le jour. Celui-ci a connu une certaine ampleur dès son commencement. Depuis, chaque année des femmes expérimentées accueillent de nouvelles initiées qui apprennent les rudiments de la pêche à la mouche, le tir avec des armes et des arcs ainsi qu’une panoplie d’ateliers pertinents à la découverte et la maîtrise d’aspects techniques liés à ce domaine.   

Dans la foulée des initiatives du même genre, la page Facebook Filles de Bois était mise en ligne en septembre 2018 par mon amie Kate Nadeau. Aujourd’hui, cette plateforme d’échange compte 32 000 filles. Les filles sont curieuses et très éprises de nature, me dit Kate à propos de ce regroupement. Aussi, elles se partagent beaucoup de destinations à visiter entre elles.   

Le plein de nature 

Signe du temps et de cet élan de popularité, je dispensais récemment une formation à des filles membres de ce groupe. Sur 25 participantes, plusieurs chassaient entre elles sans aucun gars présent lors de certaines expéditions. Elles chassent, dépècent et sortent l’animal du bois entre elles. « Les filles chassent aussi pour aller faire le vide de leur vie active durant la semaine, en allant faire le plein de nature, de chasse et pêche durant ces précieux week-ends qui leur font du bien », soulignait Tania Gomes, une des participantes à cette formation.  

Lors d’un de mes récents voyages de pêche en Mauricie, il y avait 12 filles dans le chalet voisin du nôtre. Il s’agissait du cinquième voyage en pourvoirie pour ce groupe de filles qui avaient toutes pris du poisson dans la journée. Les femmes prennent des vacances de chasse et de pêche et ce faisant, elles découvrent plusieurs belles régions touristiques ainsi que les joyaux comestibles qui se retrouvent dans nos forêts et nos lacs. Le soir venu, elles se font des soupers cinq étoiles!  

 

Des modèles  

Certaines filles se spécialisent aujourd’hui dans la chasse et la pêche, dont Marie-Andrée Guilbault. Elle est guide, chroniqueuse et conférencière dans l’équipe Chasse Québec. Marie-Andrée chasse, trappe, pêche et éviscère elle-même toutes ses grosses captures en passant de l’ours à l’orignal.   

Cette aventurière, maman de deux filles, marque un peu l’imagination, car elle a une brillante carrière en santé animale. En bref, Marie-Andrée intervient efficacement envers la vie d’une panoplie d’animaux domestiques durant la semaine, mais durant les week-ends, elle guide et chasse elle-même de grosses bêtes sauvages, souvent à l’arc et à l’arbalète.   

Dans le livre La grande expérience de la chasse, le journaliste et auteur Luc Chartrand cite Marie-Andrée en ses termes : « Quand on est en mode chasse, on est camouflée et on minimise nos odeurs, alors on vit une expérience plus intense que lorsqu’on va marcher en forêt un après-midi. » Selon Marie-Andrée, « on doit connaître, respecter et aimer les animaux sauvages de la forêt à l’assiette pour devenir une bonne chasseuse ».  

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Marie-Andrée Guilbault

Une place sous-estimée 

La place des femmes à la chasse a possiblement été sous-estimée et de plus en plus de découvertes en archéologie relativisent le tout. L’ouvrage Lady Sapiens, qui se veut une enquête sur la femme au temps de la Préhistoire, révèle qu’elles maîtrisaient de nombreux savoirs, dont ceux reliés à l’art de la chasse. À l’époque des clubs privés de chasse et pêche, il arrivait même durant un automne que plus de 50 % des orignaux étaient déjoués par des chasseuses.  

Aujourd’hui, les femmes chassent et pêchent surtout pour passer du temps de qualité en forêt, pour se ressourcer et pour connaître la traçabilité de ce qui se retrouvera dans leur assiette en y ayant participé. Un nombre significatif de femmes consacrent dorénavant beaucoup d’heures à leurs activités et leur présence dynamique amène l’industrie à développer de l’équipement, du linge et des forfaits spécifiques à elles. Lors de ma récente formation en avril 2025 auprès d’un groupe de femmes, quelques-unes d’entre elles m’ont signifié que c’était elles qui avaient initié leurs nouveaux conjoints à la chasse et à la pêche. Cette perspective illustre avec justesse que les mentalités ont bien changé et que c’est très beau d’assister à cette dimension dans la poursuite de nos traditions.